L’origine du "trophée de la Auld Alliance"

26 février 2018

Un trophée honorant les victimes de la Première Guerre Mondiale issues des communautés du rugby écossais et français a été lancé au BT Murrayfield le dimanche 11 février 2018. Chaque année, il sera remis au vainqueur de la rencontre entre les deux pays, lors du Tournoi Natwest des 6 Nations.

Le Trophée Auld Alliance, s’inscrivant dans le cadre du centenaire de l’armistice, sera disputé pour la première fois lors du match opposant ce dimanche l’Ecosse et la France lors de la seconde journée du Tournoi des 6 Nations. Initiée dès 1295, la Auld Alliance, ou Vieille Alliance, a marqué les relations privilégiées entre la France et l’Ecosse jusqu’à aujourd’hui.

Le Trophée Auld Alliance commémore plus spécifiquement les capitaines des deux nations lors des derniers matchs joués avant la Première Guerre mondiale : Eric Milroy (Ecosse) et Marcel Burgun (France), qui ont tous deux péri durant le conflit. Mais c’est aussi un hommage à tous ceux qui ont fait le sacrifice ultime : 22 internationaux français et 31 écossais ont été tués au combat, ainsi que d’innombrables autres joueurs originaires des deux nations.

L’initiative de la création de ce trophée repose sur la création d’un 1er trophée Eric Milroy Challenge Black Watch qui a été sculpté et réalisé par Christian RAOULT et qui a été disputé dans la Somme en février 2017. Patrick CAUBLOT et Christian RAOULT ont eu l’idée depuis 2016 de créer un trophée pour le monde professionnel du rugby entre la France et l’Ecosse. En parallèle de la commémoration Ecossaise qui s’est déroulée dans la Somme et à Amiens du 9 au 12 février 2017, ils ont évoqué leur projet à la FFR et à la Scottish Rugby Union. La mère d’Eric Milroy, en 1920 a offert un 1er trophée au George Watson’s College qui récompense chaque année le meilleur buteur de cette école. Les frères Hastings Gavin et Scott l’ont d’ailleurs gagné durant leurs études. Douglas Kinloch Anderson, l’un des descendants d’Eric Milroy et fabricant de kilts de la couronne l’a aussi gagné en 1956. C’est en 2016 que Christian Raoult a sculpté et moulé un beau trophée en bois et matériaux composites dont il a le secret. Représentant un livre en bois, tel un vieux grimoire, le visage de Milroy, le coq et le chardon et l’Eilean Donan Castle y sont représentés. Ce trophée porte le nom de " Challenge Black Watch Eric Milroy " en mémoire du célèbre bataillon qui comptait dans ses rangs le lieutenant Eric Milroy. Ce trophée est destiné au monde vétéran et rugby loisir et constitue un lien entre le passé et l’avenir. Comme le dis le vieil adage, jamais 2 sans 3.


Ce trophée prévu pour le rugby amateur a permis d’ancrer la volonté de l’association et de la famille Anderson de faire aboutir le projet d’un trophée pour le rugby professionnel, puisqu’il est passé de la Cathédrale d’Amiens et sa Mairie à l’Ecosse en juin 2017 y compris auprès d’Eilean Donan Castle., endroit magique de l’Ecosse avec un pont semblant remonté le temps entre le chardon et le Coq. Ce lieu a inspiré Christian RAOULT.


Effectivement, à force de travail et de détermination l’association et David Anderson QC ont été reçu le 12 juin 2017, par la Scottish rugby Union pour négocier une étape du parcours commémoratif de février 2018 au Murrayfield World War Mémorial. Commémoration qui s’est déroulé du 9 au 11 février 2018 ( National World War Mémorial au Château d’Edinburgh, le Consulat de France, Murrayfield, Inverleith RFC, Kinloch Anderson Ltd, George Waston’sCollege et Myreside, Howe Of Fife RFC Cupar et Musée Black Watch de Perth) avec un final au Murrayfield BT. C’est au cours de cette réunion que le lancement du 3ème trophée a été évoqué. La SRU sensible à l’intérêt de commémorer leurs 30 internationaux a eu une oreille très attentive. Le Trophée du monde professionnel porte le nom de : "Trophée de la Auld Alliance en mémoire des rugbymen Ecossais et Français tombés pendant la 1ère guerre mondiale". La SRU a demandé à l’association Mémoire de Rugby de trouver un joueur Français digne d’apparaître avec le nom de Milroy sur le trophée. C’est ainsi que Christian RAOULT et Patrick SANDOU, artiste et metteur en scène se sont lancés dans cette recherche. Il fallait un international Français mort sur le front Est (Milroy décédé sur le front Ouest), décédé en 1916 (la même année que Milroy) ayant joué contre Milroy et ayant un beau parcours universitaire. C’est ainsi que le nom de Marcel BURGUN (1er international de l’Olympique Castrais et ancien du RCF) est apparu comme une évidence parmi les 22 internationaux Français morts sur le champ d’honneur. Burgun a joué contre Milroy en 1913 au Parc des Princes Vélodrome. Ensuite, Patrick SANDOU s’est mis en quête de retrouver les descendants de Burgun, et il y réussi. Il s’agit d’Antoine et de Romain Cabanis. Romain Cabanis descendant de Marcel Burgun et Lachlan Ross descendant d’Eric Milroy ont été choisi par la SRU pour acheminer le trophée de la "Auld Alliance" des vestiaires au terrain lors de la 1ère édition, le dimanche 12 février 2017 à 15h00 au Murrayfield BT Stadium. Le Monde amateur a pu s’exprimer et faire aboutir ce beau projet avec l’appuie de la Famille ANDERSON, la Scottish Rugby Union, la Mission du Centenaire, l’ONAC-VG, Amiens Métropole, la Région Hauts-de-France et la FFR. La 1ère édition a été remportée par l’équipe d’Ecosse sur le score de 32-26 dont 22 points marqués par la botte du numéro 9, Laidlaw, Eric Milroy était également numéro 9, doit-on y voir un signe du destin.

Dimanche, le Trophée a été présenté par les deux présidents des fédérations, Bernard Laporte (FFR) et Rob Flockhart (Scottish Rugby), accompagnés par les représentants de la dernière génération des familles Milroy et Burgun : Lachlan Ross et Romain Cabanis, 11 ans.

Pour Bernard Laporte, président de la FFR : « Avec le Trophée Auld Alliance, la FFR et la SRU célèbreront la relation forte entre la France et l’Ecosse à l’occasion de chaque Tournoi. C’est un symbole fort pour nos deux nations et un hommage important aux victimes de la Première Guerre Mondiale. Dès dimanche, le XV de France aura l’honneur de disputer ce nouveau Trophée ».

Rob Flockhart, président de la Scottish Rugby, a déclaré que « le sacrifice fait par tant de joueurs issus de la famille du rugby durant la Première Guerre mondiale ne doit jamais être oublié. Notre commémoration annuelle de l’armistice sous la war memorial arch au BT Murrayfield est un reflet poignant de cette perte ressentie par tant de communautés à travers le monde. Quand nous avons reçu la proposition pour le trophée, nous connaissions l’ampleur de la perte. Pourtant, l’histoire personnelle de Milroy et de Burgun a rendu le trophée totalement convaincant. »

David Anderson a déclaré qu’ « Eric Milroy et Marcel Burgun, respectivement capitaines d’Ecosse et de France en 1914, sont personnellement nommés sur le trophée. Ils représentent les sacrifices jamais oubliés faits par les joueurs de rugby des deux nations et incarnent la Auld Alliance qui a été renouvelée pendant la Grande Guerre. »

Patrick Caublot, qui a organisé une commémoration de 3 jours dans la région d’Amiens à l’occasion d’une visite des Mémoriaux de la grande guerre (Beaumont-Hamel, Thiepval, Longueval et Contalmaison), a déclaré que « le trophée souligne que l’esprit de la Auld Alliance va pouvoir continuer à vivre. »

A propos d’Eric Milroy :


Élevé à Edimbourg, Eric Milroy, demi de mêlée, est devenu un grand défenseur du rugby, avec lequel les Watsonians ont remporté le championnat écossais (non officiel à l’époque) quatre fois avant la guerre. Il s’est rendu en Afrique du Sud avec les Lions britanniques en 1910 et a été sélectionné 12 fois avec l’Ecosse, dont une fois contre la France de Burgun en 1913. Il a été tué à l’âge de 29 ans dans la Somme en 1916, lorsqu’il était mitrailleur avec le 9 ème bataillon Black Watch. À la veille de la bataille, Milroy écrivit à sa mère, Walteria, qui lui conseillait souvent de « se tenir à l’écart » et de se mettre à l’abri du danger sur le terrain de rugby. Dans sa dernière lettre, Milroy écrit : « Nous aurons de légers ennuis demain. Donc, je vous préviens juste que je ne pourrai pas me « tenir à l’écart ».

A propos de Marcel Burgun :


Né à Saint-Pétersbourg, fils d’un horloger français qui travaillait pour le Tsar, Marcel Burgun (international N°47), gagna ses premières sélections en équipe de France alors qu’il évoluait au Racing Club à Paris. Puis il a rejoint le Castres Olympique. Il a été sélectionné à 11 reprises faisant ses débuts contre l’Irlande en 1909. Il a joué quatre fois contre l’Ecosse et fut de la première victoire française durant le Tournoi contre l’Ecosse en janvier 1911. Burgun a appris que son frère aîné avait été tué durant les premières batailles. Il est devenu artilleur puis pilote. Il meurt au combat durant l’été 1915. Il a remporté la Croix de Guerre. Il a donné son nom à une rue de la Ville de Castres.